Tout le monde connaît la fameuse petite chanson, chantée sur les ondes de la Résistance française, pendant l'occupation allemande : "Radio Paris ment, Radio Paris ment, Radio Paris est allemand..."
On peut se demander, à la lecture du courrier qui accompagnait, le 16 décembre, la nouvelle mouture de la bascule des salaires dans DECFO-SYSREM, s'il ne s'agirait pas de se remémorer cette mélodie à propos du Gouvernement vaudois, qui n'est pourtant pas un gouvernement de "collaboration" avec l'ennemi (en tout cas pas d'intelligence avec quelque ennemi que ce soit, cela paraît impossible) à notre connaissance... Cela dit, les faits sont troublants. Comment accepter, en effet, (parmi d'autres aussi délicieux...) le paragraphe antépénultième de la missive gouvernementale sans sourciller du bonnet?
Oui, oui, je le recopie :
"Si le nouveau système salarial représente pour la grande majorité une hausse de salaire, le Conseil d'Etat est conscient que, pour certains, il s'accompagne d'une diminution des attentes de progression salariale. C'est là le résultat d'un système qui donne la même progression salariale (45%) à toutes les classes alors que l'ancien système offrait une progression d'autant plus élevée que l'on montait dans l'échelle salariale. Le nouveau système est ainsi plus favorable et plus juste pour les fonctions les moins bien classées. Par ailleurs, il est plus lisible et plus transparent."
<<Alléluia, Noël, Noël, les anges dans nos campagnes!>>, doit-on crier à la lecture de la prose gouvernementale...
Sauf qu'il faut déjà goûter, en premier, l'euphémisme : "certains" qui doivent s'attendre à une "diminution des attentes de progression salariale" (qu'est-ce qu'une "diminution des attentes de progression salariale", au fait? Une réduction de la file d'attente au guichet pour recevoir sa gratification annuelle?), "certains" dévalorisés, donc, ce sont probablement plus de 40% des membres du personnel!
Deuxièmement, on peut douter que la dévalorisation des nouveaux maîtres de gymnase, par exemple, "résulte d'un système qui donne la même progression salariale (45%) à toutes les classes", puisqu'il suffirait de mettre tous les maîtres de gymnase en classe 13 (nouveau système, avec les 45% de progression sur 26 ans) pour que le nouveau statut soit l'équivalent (inférieur de 0,04%, d'après nos calculs, mais nous ne sommes pas mesquins) de l'ancien (anciennes classe 28-31).
Troisièmement, on peut douter également que le nouveau système soit "plus favorable et plus juste pour les fonctions les moins bien classées" : les nettoyeuses (oui, ce sont des femmes, c'est étrange : elles sont d'ailleurs souvent d'origine étrangère...) des gymnases apprécieront, elles qui sont bloquées leur vie entière au salaire minimal avec 0% de progression salariale! Quelle patience dans "l'attente de progression salariale"!
Et, quatrièmement, la dernière formule fera rire tout le monde, même sans avoir bu. Le nouveau système y est dit "plus lisible et plus transparent"! A cet égard, c'est bien le chef de service de l'enseignement postobligatoire, le désormais légendaire "Pélerin" Bez, qui aura le dernier mot, puisqu'il a proféré, devant les enseignantes et enseignants médusé-e-s de Burier, la formule "biblique" suivante :
« Rien ne justifie ni n’explique le motif de votre perte de salaire-carrière,
sinon le hasard du fonctionnement du système !».
Amen!
Philippe Leignel